Printer Friendly Version Pourquoi les Serbes sont en deuil tandis que la Croatie célèbre l’anniversaire de l’opération appeléе la Tempête @ 4 August 2021 09:50 AM

L’anniversaire triste de l’exode du peuple serbe.

L’opération militaire Oluja (la Tempête) se déroula du 4 au 7 août 1995 et permit à la Croatie de reconquérir un territoire de 10.400 km². Ce territoire, habité majoritairement par des Serbes et plus connu comme le Krajina, se trouvait jusque-là sous le contrôle de la population serbe locale et sous la protection de la mission de l’ONU. Dans cette courte période environ 220.000 Serbes sont expulsés de Krajina par l’armée croate. Près de 2.000 Serbes, dont 1.200 civils – hommes, femmes et enfants – ont été tués. L’armée croate mobilisa 200.000 soldats pour accomplir une opération militaire qui représente le plus vaste nettoyage ethnique en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Des dizaines de milliers de familles serbes ont dû abandonner en une nuit leurs maisons, leurs terres, leur histoire - sans aucun espoir de retour. Des siècles de présence serbe dans la région et de résistance aux invasions étrangères ont été effacés en quelques jours. Ces 220.000 hommes, femmes, enfants et vieillards, formaient un cortège humain de plusieurs centaines de kilomètres fuyant sous les bombes et les tirs de l'armée croate vers l'Est – vers la Bosnie et la Serbie. Le dommage matériel est immesurable. Lors de l’opération Tempête les forces militaires de Croatie ont détruits et brulés plus de 13.000 bâtiments, 352 marchandises et 25.000 maisons d’habitations dont les propriétaires étaient des Serbes. Egalement 78 églises, 96 musées, 920 monuments, 52 hôpitaux et presque tous les objets industriels ont été endommagé ou détruits. L’agression de la Croatie contre le Krajina a été commise malgré le fait que cette région était sous la protection de l’ONU, organisée en deux secteurs, Nord et Sud, et malgré les dispositions du plan de paix proposé par la communauté internationale qui fut accepté par les représentants des Serbes de Krajina. Entreprise criminelle conjointe L’opération Tempête s’inscrivait dans le projet du président croate de l’époque, Franjo Tudjman, visant à créer une Croatie pure ethniquement. Tudjman essayait à sa mise en œuvre, dès son arrivée au pouvoir, via les modifications constitutionnelles qui restreignaient le statut de nation aux seuls Croates, tandis que les minorités ethniques et religieuses présentes dans ce pays voyaient leurs droits réduits. Les retranscriptions des instructions données par le Président croate à son état-major lors de la réunion préparatoire à l’opération Tempête, le 31 juillet 1995 à Brioni, parlent d’elles-mêmes : « [Il faut] infliger un tel coup aux Serbes qu’ils disparaîtront pratiquement» commandait Président Tudjman à ses généraux. L’aspect criminel de la Tempête est souvent négligé par une partie de la communauté internationale. Personne du commandement militaire et des dirigeants politiques croate n’a été condamné pour l’expulsion de ¼ millions de Serbes, chiffre que l’on obtient en additionnant les victimes de la Tempête et de l’opération militaire Eclair. Dans l’acte d’accusation du Tribunal pénal international pour l’ex Yougoslavie (TPIY) à la Haye contre Ante Gotovina, Ivan Cermak, et Mladen Markac, généraux de l’armée Croate, la Tempête est définie comme une entreprise criminelle conjointe avec l’objectif d’expulsion permanente de la plupart du peuple Serbe de la région de Krajina. Personne parmi eux n’a été condamné (Gotovina et Markac ont été déclarés coupables d’après la décision de la première instance de TPIY mais acquittés de l’accusation par l’instance d’appel de TPIY). Malgré la condamnation de la plupart dans la communauté internationale, la Croatie continue joyeusement à célébrer chaque année l`anniversaire de l`opération criminelle la Tempête. Le 5 août, la Croatie célébrait, depuis 1995, le Jour de la victoire et de la gratitude de la patrie ainsi que le Jour des défenseurs croates. Et ce, au grand dam de population serbe. A cette occasion, la Croatie célèbre également l’un des plus grands crimes commis au cours des guerres qui ont déchiré l’Ex-Yougoslavie durant les années 90. Cette opération, qui est célébrée en Croatie comme une fête nationale, est marqué en Serbie comme un Jour de commémoration du peuple serbe qui a péri ou qui a été le sujet du nettoyage ethnique. Depuis 2014, en Serbie et en République Serbe (Bosnie-Herzégovine) le 4 aout est commémoré comme l’anniversaire du calvaire du peuple serbe dans la Seconde Guerre mondiale et lors de l’opération militaire la Tempête. Le bilan tragique de la Tempête Le bilan démographique de la Tempête est le suivant : 1852 citoyens serbes se trouvent sur la liste le centre Veritas en tant que morts ou disparus. 1309 hommes (71 %) et 543 femmes (29%). 1200 civiles (65%), 641 soldats (35%) et 11 policiers. Concernant l’âge - 9 personnes n’avaient pas encore 18 ans, entre 18 et 60 il y avait 884 victimes (48%) et 908 victimes (49%) avaient plus de 60 ans. Les années de mort ou disparition 1995 = 1806 (98%), 1996= 31 (2%), 1997= 11, 1998= 4. Région de mort ou de disparition Banija = 547, Lika = 454, Kordun = 163, Dalmatie du nord= 595, le reste du territoire de Croatie = 6, Bosnie et Herzégovine = 87. D’après le recensement de la population en 1991 en Croatie vivaient 581.663 Serbes (12,2% de population de Croatie), tandis que le recensement de 2011 indique qu’ils n’en restent que 186.633 (4,36%). Après la guerre civile et l’exode du peuple serbe le nombre total des Serbes en Croatie est diminué de 2/3. Aujourd’hui ils habitent majoritairement dans les régions qui n’ont pas été touché par l’action la Tempête. Situation actuelle des Serbes en Croatie Les Serbes qui sont restés en Croatie sont souvent considérés comme citoyens de seconde classe. Ils ont victimes de discrimination systémique. Ils sont souvent privés d`utiliser leur langue, de leur culture, du développement économique et d’une vie digne. Malgré un cadre juridique satisfaisant concernant les droits des minorités, en pratique il existe de nombreux empêchements dans la réalisation des droits des Serbes en Croatie, des droits garantis par la loi et la constitution. Les paroles de haine, du révisionnisme historique, de la discrimination du peuple Serbe, de la violence physique et des attaques sur les biens des Serbes (dont ils dépendent économiquement) et surtout dans les milieux où ils retournent, s’ajoutent à la violation de leur droit de déclaration de la nationalité, l’un des principaux droits minoritaires. Les crimes contre le peuple Serbe en Croatie à la fin du vingtième siècle ne peuvent pas être observés hors du contexte de crimes et du génocide commis contre les Serbes pendant la Seconde guerre mondiale sur le territoire de soi-disant État indépendant de Croatie (NDH). Le NDH était une création nazie dirigée par le mouvement fasciste – les Oustachis. Le régime sanglant des Oustachis a organisé les persécutions des Serbes, des Juifs, des Roms, des Musulmans et des autres minorités. Les Serbes font l’objet de massacres à grande échelles. Dans plus de 40 camps de concentration qui furent mis en place par le régime des Oustachis, parmi eux le camp de Jasenovac, des centaines de milliers de Serbes et des autres civils ont été brutalement tués. Un certain nombre de mesures prises par les autorités officielles de la République de Croatie, reflétant une politique révisionniste visant à réhabiliter l'entité fasciste appelée «État indépendant de Croatie» (NDH) et les crimes commis contre la population serbe pendant le conflit des années 1990, suscitent de graves inquiétudes en République de Serbie. Mile Budak, un des dirigeants de régime Oustachi de la Deuxième Guerre Mondiale était l’idéologue de projet de la solution finale pour la question Serbe en ayant demandé qu’il fallait tuer un tiers de la population Serbe, convertir un tiers et expulser de la Croatie un tiers. Aujourd’hui Mile Budak est considéré comme un héros en Croatie et de nombreuses rues portent son nom. Besoin d’une vraie réconciliation La Serbie a toujours montré son opposition aux célébrations de l’opération la Tempête. Les autorités serbes ont choisi d’organiser des cérémonies de commémoration des victimes de l’opération Tempête. Le gouvernement de Serbie a également décidé d’instaurer le 4 août comme un Jour du souvenir des Serbes tués et déplacés durant l’opération Tempête, qui sera également un jour de deuil national et qui apparaît comme une réponse directe aux célébrations en Croatie. La République de Serbie reste véritablement attachée à un avenir commun en Europe, à la promotion de la coopération régionale et à des relations de bon voisinage avec la Croatie, basée sur le respect du patrimoine antifasciste intégré aux fondements du projet européen et de la civilisation mondial moderne. La République de Serbie s'attend à ce que la communauté internationale condamne fermement les activités et les phénomènes menant à la glorification et à la réhabilitation du nazisme et du fascisme dans n'importe quelle partie du monde, sans exception aux événements actuels en République de Croatie. Ceux qui participent dans la célébration de l’opération Tempête en Croatie participent de facto à la célébration d’un nettoyage ethnique. Dans cette optique, il y a quelques années, Aleksandar Vučić, en ce temps-là Premier Ministre et actuel Président de la Serbie, a proposé aux dirigeants des pays de région l’instauration d’un Jour commun de commémoration de toutes les victimes des conflits des années 1990, sans distinction d’appartenance nationale. La Serbie ne célébrera jamais la tragédie du peuple Serbe, les meurtres des civiles et des enfants. Nous acceptons la réconciliation et la paix mais pas l’humiliation et le silence. Nous n’avons jamais mis la pression quelqu’un pour reconnaitre le génocide contre les Serbes ; mais nous avons toujours insisté qu`il faut montrer le respect et la piété envers les victimes et de ne pas célébrer la mort de nos compatriotes. Une nouvelle Tempête contre le peuple Serbe n’aura plus jamais lieu, parce que la Serbie ne le permettra jamais. La Serbie ne se vante pas avec sa puissance mais elle est suffisamment puissante pour ne pas permettre le pogrom de son peuple. La Tempête est l’un des plus grands crimes de nettoyage ethnique au monde entier après la Seconde Guerre mondiale. La Serbie ne fera jamais un appel aux nouveaux combats parce qu’elle s’engage pour la coopération dans la région des Balkans, mais elle est obligé de se souvenir du passé et d’en parler. La paix est l’objectif le plus important pour le peuple Serbe et c’est pourquoi le Serbie fait tout pour ne pas répondre aux messages de provocations dans la région des Balkans, qui sont malheureusement toujours nombreux et fréquents. La Serbie a reconnu les crimes commis par les Serbes, et ceux qui les ont commis ont été fermement condamnés par la Serbie. La Serbie a décidé de s'opposer aux défilés glamour et célébrations de l’opération Tempête avec un regard sur l`avenir, au développement et à la réconciliation à travers la région. Nous en Serbie - nous espérons que nous ne serons pas seul dans ce chemin.